Retourner en station et tenter de relater ses prouesses sans avoir vaincu le tracé le plus raide du domaine ne donnera lieu qu’à un haussement d’épaule dédaigneux à l’heure de l’après-ski, qu’on soit majeur ou qu’on fasse encore partie des buveurs d’Ovomaltine.

Dès lors, chacun y va de son récit: « J’ai eu froid pendant toute la descente !», « J’ai chuté dans les 50 premiers mètres et n’ai jamais pu me relever ! », «Jje l’ai adorée et je suis remontée trois fois de suite !». 

Le top des pistes noires

Oui, maîtriser ses skis pour affronter une piste noire n’est pas une mince affaire. De telles pistes, il y en a pour tous les goûts ; des très raides, des verglacées, des parsemées de champs de bosses se terminant en épingle à cheveux, adossées aux versants nord, juchées sur des murs vertigineux.  

Toutes requièrent une condition physique optimale, un savoir-faire technique et une hardiesse assumée. Mais quel plaisir quand on réussit à rester debout sur ses skis ou son snowboard ! Et si la poussée d’adrénaline manque à l’appel on peut toujours tenter un nouveau défi technique en chaussant des télémarks.

Ces défis posent la question de la sécurité sur les pistes noires, souvent parent pauvre de l'aventure en montagne. Dominique Perret, légende de la glisse extrême, rappelle que la mortalité des accidents liés au freeride augmente de 15% tous les ans, et donne des... pistes à la portée de tous.

 

1. Chavanette, Portes du soleil (VS) 

Photo © Champéry Tourisme

La plus citée de toutes. Ah, Chavanette ! Située sur le domaine franco-suisse des Portes du Soleil, Chavanette, dite aussi le Mur suisse, est classée orange puisqu’elle présente des caractéristiques encore plus ardues que les pistes noires standard. Sa pente moyenne est de 37% mais dans la première partie, plus raide, cette déclivité monte jusqu'à 90%.

Tomber au début de la piste garantit une glissade effrénée jusqu’au fond, 300 m plus bas. Seuls les très bons skieurs pourront apprécier ses bosses, glacées et particulièrement hautes (2 mètres) après de nouvelles chutes de neige. Pour les autres, renoncer ou s’équiper d’un casque et d’une protection dorsale.  

Longueur 1 km 
Dénivelé 331 m
Pente moyenne 37%, mais 90% sur les 50 premiers mètres
Accès Par Champéry-Les Crosets via le télésiège de Chavanette, ou par celui des Choucas depuis Avoriaz (F) 
regiondentsdumidi.ch 

 

2. Piste du Mont-Fort, 4 Vallées (VS)

Photo © Sarah Bourne

Appréciée autant par les skieurs que par les freeriders, la piste du Mont-Fort au-dessus de Nendaz suscite le respect. Référence parmi les pistes mythiques, elle met à l’épreuve muscles et articulations des très bons skieurs qui peuvent rejoindre, 350 mètres plus bas, le col des Gentianes (2950 m).

Et si finalement, on décide de renoncer à s’élancer à travers ce champ de bosses non damé, on ne perdra pas la face. On était juste monté pour le coup d’œil sur le Cervin, la Dent d’Hérens, le Grand Combin et le Mont Blanc avant de redescendre – comme prévu depuis le début  –  par le téléphérique installé en 1983, les skis c’était pour la déco !  

Longueur 1,7 km 
Dénivelé 481 m 
Pente moyenne 49% 
Accès Télésiège Siviez-Tortin, téléphérique Tortin-Les Gentianes, téléphérique Les Gentianes-Mont-Fort 
telenendaz.ch 

 

3. Le Stade, Les Bugnenets-Savagnières (NE/BE) 

Photo © Bugnenets-Savagnières SA

En aval de l’émetteur du Chasseral, la piste noire du sommet du Rumont joue dans la cour des grands. En 1997, la FIS (Fédération internationale de ski) l’homologuait pour l’organisation de slaloms géants. Des skieurs tels que Daniel Defago, Julien Lizeroux ou encore Cyprien Richard s’y sont ainsi affrontés.

Situé sur le plus grand domaine skiable de l’arc jurassien, le Stade fait aussi le bonheur des descendeurs qui la dévalent droit en bas ! Dans les années 90, on y organisait des courses et des noms célèbres du ski tels Steve Locher y ont usé leurs lattes.

Ouverte à tous, techniciens à virage ou intrépides en mode kilomètre lancé, elle accueille aussi les meilleurs compétiteurs de la région issus du Centre régional de performance.  

Longueur 1,3 km 
Dénivelé 303 m 
Pente moyenne 23% 
Accès Téléski Le Rumont
chasseral-snow.ch 

 

4. Black Wall, Les Diablerets-Glacier 3000 (VD) 

© Germain Favre-Felix

Depuis 2022, une galerie de 260 m. équipée d’une surface de glisse synthétique permet aux aficionados de la piste noire de Pierres-Pointes, rebaptisée Black Wall, de retrouver ce tracé mythique fermé en 1999.

Ses petites maladies de jeunesse surmontées, la piste offre 88% de déclivité dans ses premiers mètres, ensuite de la poudreuse pendant 3 km. De quoi satisfaire les plus mordus !

A titre de comparaison, la piste la plus pentue du monde est la Kandahar à Garmisch-Partenkirchen (A) qui affiche une pente de 92% ! Accrochez-vous au pinceau, j’enlève l’échelle ! 

Longueur 3 km  
Dénivelé 1000 m  
Pente moyenne 35% avec un pic à 104% 
Accès Par la piste du Martisberg (noire), puis via un tunnel de 265m à travers la falaise 
glacier3000.ch 

 

5. Piste Léo Lacroix, Jura sur Léman (VD/F) 

© Benjamin Becker/Station des Rousses

Située à 20 km de Nyon, la piste Léo Lacroix qui culmine au sommet du Noirmont offre une superbe vue sur le lac des Rousses. Joyau du domaine skiable franco-suisse de Jura sur Léman, on y accède via deux téléskis accrochés à la pente suisse qui chauffent les cuisses avant une arrivée sur un mur très abrupt.

Réservée aux skieurs chevronnés, elle est technique et souvent verglacée. Elle affiche un vertigineux dénivelé de 1000 mètres, de quoi faire pulser plus d’un cœur pourtant bien accroché ! Pour l’anecdote, à sa construction le téléski d’origine - dont le départ est en France et l’arrivée en Suisse - a été muni d’un bouton stop permettant aux douaniers de contrôler l’identité des skieurs et surtout leur éventuel chargement de marchandises illégales…  

Longueur 1,6 km  
Dénivelé 955 m 
Pente moyenne 36% 
Accès Deux téléskis, Noirmont-nord et Noirmont-sud  
teledole.ch/jura-sur-leman 

 

6. Piste du sommet, Moléson (FR) 

© Gruyère Moléson Tourisme

La piste noire vertigineuse attend les plus expérimentés. Partant du sommet, la cuvette de champ de bosses se termine sur un goulet d’étranglement suspendu dans le vide qui mène les sportifs sur un enchaînement de virages confortables. Non damée, c’est désormais plus un itinéraire hors-piste. 

Accès Téléphérique de Plan-Francey, Moléson-Village 
moleson.ch 

 

7. Piste de Chaux-de-Mont, Leysin (VD)

© DR

Des bosses, rien que des bosses. Accrochée au versant ensoleillé de la Tour d’Aï cette piste requiert souplesse et rapidité si on veut la dévaler avec élégance.  

Accès Télésiège Berneuse, puis téléski Chaux-de-Mont 
alpesvaudoises.ch 

 

8. Le Pralet, Les Paccots (FR) 

© DR

Une ligne droite enivrante entre le sommet du Pralet à 1568 m et l’arrivée au téléski des Rosalys 433 m. plus bas. Le schuss final est particulièrement apprécié des connaisseurs.

Accès Via les téléskis de Borbuintze et de la Cagne ou directement via le téléski des Rosalys.  
station-les-paccots.ch 

 

9. Piste de Châtillon, Ovronnaz (VS)

© DR

Plus longue et avec un dénivelé qui passe à 760 m depuis l’hiver 2022, la piste casse-patte de la station n’a jamais été aussi intéressante.

Avec ses pentes à 60° par endroits, elle est assurément extrême. Nichée au coeur du domaine skiable d'Ovronnaz, cette piste représente le coté obscur d'une station qui lie sports d'hiver et bains thermaux. 

Accès Télésièges de Jorasse et du Col
ovronnaz.ch

 

10. Piste de Lona, Grimentz (VS)

Photo © Suisse Tourisme

Dans le val d’Anniviers, une piste sécurisée et grandiose avec son départ à 2920 m au pied des Becs de Bosson, offrant des sensations variés, entre passages rapides et virages sinueux.

Les skieurs les plus expérimentés se feront plaisir dans le domaine free ride d’exception. Non sécurisé, cet espace est ouvert uniquement lorsque le risque d’avalanche est réduit et requiert une prudence extrême et un matériel spécialisé

Départ: télécabine Grimentz-Bendolla, télésiège Les Crêts puis téléskis Lona
www.rma.ch

 

11. La Kandahar, Crans Montana (VS) 

© Luciano Miglionico

La piste part de la Plaine Morte à près de 3000 m et suit le Funitel. Après ces premiers émois, on pourra rejoindre la station, 8 km plus loin.

Accès Télécabines des Violettes et Funitel
mycma.ch

 

12. L’Etherolla, Thyon (VS)

® DR

La plus haute piste du domaine skiable offre des points de vue saisissant sur la vallée du Rhône, la dent Blanche et le barrage de la Grande Dixence. 

Accès Télésièges des Masses et de l’Etherolla 
thyon.ch 

 

13. La combe d’Audon, Les Diablerets (VD)

© Glacier 3000

Départ à près de 3000 mètres sur le versant du Scex Rouge pour cette piste longue (7 km) et haut perché, traversant la vallée alpine d’Oldenbach.

Le panorama à couper le souffle est un prélude à une des plus belles noires du circuit alpestre. Les esthètes apprécieront.

Accès Téléphérique Col du Pillon – Cabane – Scex Rouge, 
diablerets.ch 

 

14. Piste Didier Défago, Morgins (VS) 

© DR

Ouverte en 2011, cette piste des Portes du Soleil créée en l’honneur du champion olympique Didier Défago plaira aux amateurs de sensations fortes avec son départ très raide.  

Accès Télésiège Pointe de l’Au, Champoussin
regiondentsdumidi.ch 

 

15. Pistes de Mont-Dolin et du Tsaté, les pépites de l'Espace Dent-Blanche (VS)

© Valais Wallis Promotion - David Carlier

Les trois stations formant le domaine skiable de la Dent Blanche au fond du val d’Hérens offrent des pistes uniques, non damées, rares, saupoudrées de neige naturelle qui voient passer tous les deux ans les coureurs de la Patrouille des glaciers.

Celle du Tsaté, à la Forclaz, prend son départ à 2204 m. Celle de Mont-Dolin, à Arolla, sillonne sur 9 km un paysage unique et majestueux, au-dessus d'Evolène.  

 Accès Téléski les Fontanesses 1, Arolla et téléski du Tsaté, La Forclaz
espacedentblanche-evolene.ch

 

Sécurité - Des pistes pour sauver des vies

 © Benny Tâche

Légende de la glisse extrême, élu meilleur skieur freeride du siècle en 2000, le Chaux-de-Fonnier Dominique Perret se consacre désormais à la sécurité de tous sur les lattes. Si les domaines skiables ont atteint un niveau de professionnalisme remarquable, estime-t-il, «en Suisse, la mortalité des accidents liés au freeride augmente de 15% tous les ans, c’est faramineux ! On compte 24 à 30 morts chaque année et l'accidentologie est en hausse de plus de 220% depuis 2005.»

La prévention avant tout

L’erreur la plus commune ? Penser qu’en accumulant le matériel – DVA, sonde, pelle, airbag – on peut prendre plus de risques. «Mais tout ça ne sert qu’à une chose : sortir une victime de la neige. Croire que ces équipements de secours augmentent votre sécurité est un non-sens.»

Et si, face aux têtes brûlées, il y a peu de chose à faire ; par contre, on peut contrer l’ignorance. «Avec WEMountain, nous avons mis sur pied des formations basées à 80% sur la prévention. En clair, nous enseignons comment ne jamais avoir à utiliser son matériel de secours, c’est-à-dire à éviter les drames.»

Créer un écosystème

La formation se fait en ligne, au rythme de chacun, en passant de module en module. Ensuite, ceux qui le souhaitent peuvent approcher des guides de montagne ou des professeurs de ski certifiés qui vont valider leurs compétences. «A l’usage, on peut dire que c'est très efficace, estime encore M. Perret, et que les résultats sont fantastiques puisque ça n’est qu’une fois la théorie comprise que son application en montagne prend tout son sens.»  

Son but ultime, créer un écosystème comprenant pratiquants, stations, marques et professionnels de la montagne pour faire baisser la mortalité et la gravité des accidents puisqu’il s’agit avant tout «ressentir plus de plaisir, plus de liberté tout en profitant de plus de sécurité».
w3mountain.com

Par Isabelle Carrel - 24 janv. 2024

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